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Il est presque 19 heures en cette soirée d’hiver. Alissar, 17 ans, rentre chez elle à Bireh, une région rurale du Liban. Elle porte à bout de bras deux sacs remplis de courses.
Trois ans plus tôt, cette scène aurait été inimaginable pour une jeune fille comme elle.
Qu’est-ce qui a changé ? Plusieurs lampadaires à énergie solaire ont été installés le long de la route principale de la ville
Alissar a l’air timide au premier abord. Mais son franc-parler revient rapidement.
« Notre société est contre les femmes », dit-elle calmement. « Dans notre village par exemple, les gens ne font pas de commérages sur les garçons, mais ils en font sur les filles. »
« Moi je m’en fiche. On peut bien raconter ce que l’on veut, je sais qui je suis. »
Contrairement à certains membres de leur famille ou amis, les parents d’Alissar ont une approche progressiste concernant l’éducation de leurs filles.
« Nous avons grandi avec l’idée que les filles doivent abandonner l’école pour rester à la maison », raconte Iman, la mère d’Alissar. « Je pense différemment. Mon mari et moi, nous donnons à nos enfants la possibilité de faire ce qu’ils veulent dans la vie. »
Et en tant que parents de sept filles, ils ont beaucoup d’expérience en la matière.
Dans les communautés très soudées comme celle de Bireh, presque tout le monde se connaît. Et pourtant, les parents ont encore peur pour la sécurité de leurs filles. À la nuit tombée, elles restent donc à l’intérieur.
Mais ça, c’était avant. Avant l’arrivée des lampadaires.
Aujourd’hui, de simples choses comme faire ses courses après la tombée de la nuit sont de nouveau possibles. Les femmes et les filles peuvent elles aussi se promener, se faire des amis et profiter de leur temps libre.
Assise dans le salon et entourée de sa famille, Alissar parle librement de ses rêves et aspirations.
« Je ne pense pas au mariage. Je veux voyager : Londres, New York, Paris... Rencontrer des gens en dehors du Liban, c’est ce qui est le plus important pour moi. »
La barre est haute, mais la jeune femme est déterminée. Maintenant que la porte de sa maison est ouverte en permanence, elle peut sans crainte en franchir le seuil et écrire son avenir.
Asma est assise sur un vieux canapé dans son petit deux pièces à Bekaa. Elle joue aux cartes avec son fils Rico, 15 ans, qui vit avec elle. Le jeu s’appelle « Fourteen » et est comparable au « Rami ».
« Nous jouons à notre façon….nous avons nos propres règles », dit-elle en riant.
Les journées sont courtes et les nuits froides à Bekaa. Les gens passent donc la plupart de leur temps à l’intérieur. Mais avec des coupures de courant qui durent la moitié d’une journée, les possibilités pour s’occuper sont limitées.
Alors quand il n’y a pas de courant le soir, Asma joue généralement aux cartes avec Rico.
Asma fait partie de celles qui ont de la chance. Son petit équipement photovoltaïque produit assez d’électricité pour alimenter trois pièces et un chargeur de téléphone portable.
C’est une aide modeste, mais cela change tout.
Asma travaille à la municipalité locale et ses revenus sont tout juste suffisants pour payer les factures. Et bien qu’elle soit mariée depuis 10 ans, elle vit en célibataire. Son mari est bangladeshi, mais les relations interculturelles étant mal acceptées au Liban, il a été contraint de quitter le pays.
Bien qu’elle vive dans l’incertitude, Asma a de l’espoir, en particulier pour l’avenir de Rico.
L’été redonne de l’énergie à Asma. Elle aime être active, c’est ce qui lui permet de surmonter les difficultés de la vie.
« Généralement, je m’occupe de la maison ou je jardine. Quasiment chaque jour, Rico et moi faisons du vélo ensemble, on joue même au football ou on va courir dans les alentours. »
Au Liban, la vie n’est pas facile pour les mères célibataires. Mais lorsqu’Asma voit le sourire de son fils, elle se dit que ses efforts ne sont pas vains.
Elle abat sa dernière carte et remporte la mise. Peut-être le signe qu’un bel avenir est devant elle.
La maison de Sahar est entourée de montagnes et se situe dans l’une des régions les plus pauvres du pays. En hiver, les températures peuvent chuter jusqu’à -10C (14F).
Et pourtant, c’est une bouffée de chaleur qui vous accueille en entrant chez elle, diffusée par un poêle qui trône au milieu du salon.
Sahar n’est pas une grand-mère comme les autres. À presque 60 ans, elle doit s’occuper de ses cinq petits-enfants, âgés de 18 mois à 11 ans. Elle n’a pas le choix : son fils Ali est parti travailler à Beyrouth avec sa femme, et les 500 dollars mensuels qu’il gagne sont le seul revenu de la famille.
En arabe, « Sahar » veut dire « aurore ». Et tous les jours, elle se réveille à six heures du matin, fait le petit déjeuner pour toute la famille et aide les enfants à se préparer pour l’école.
Sahar se sert aussi du poêle pour faire à manger pour toute la famille ; les ragoûts libanais sont sa spécialité. Et le matin, après leur douche, les enfants se précipitent vers le poêle pour se réchauffer.
« En général, on utilise le poêle d’octobre à mai. Si on ne me l’avait pas donné, je ne pourrais pas chauffer la maison. Le combustible et la nourriture sont bien trop chers et nous n’avons plus les moyens. »
Sahar a l’habitude de prendre soin des autres. Avant, elle était infirmière. Aujourd’hui, il lui est difficile d’élever les 5 enfants, à cause de sa santé fragile et des faibles revenus du foyer. Le poêle, tout modeste qu’il soit, lui enlève un souci en gardant la famille au chaud.
Et voir les enfants en bonne santé, à l’abri du froid et pleins d’énergie, est ce qui lui donne la force de continuer.